Corruption au Parlement européen : de nouveaux témoignages enfoncent le Maroc

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Après la modification du règlement intérieur du Parlement européen permettant au nouveau parquet européen de demander la levée d’immunité d’eurodéputés impliqués dans le « Marocgate », de nouveaux témoignages accablants éclairent davantage le rôle de certains députés corrompus et leurs liens avec le Makhzen.

Comme l’ancienne eurodéputée portugaise Ana Gomes, qui a confirmé que le Maroc a versé des pots-de-vin pour influencer les politiques européennes, c’est au tour de l’Espagnole Ana Miranda, du Groupe des Verts/Alliance libre européenne, de venir apporter son témoignage sur ce retentissant scandale et du lobby pro-marocain pour saper et boycotter toutes les initiatives qui déplaisaient au Makhzen, notamment la question des droits de l’Homme et du Sahara occidental occupé, rapporte le journal italien Ilfattoquotidiano.

L’eurodéputée, qui a participé aux votes de tous les accords de pêche, rappelle que « l’accord de 2019 entre l’UE (Union européenne) et le Maroc a été approuvé avant la dernière décision de la Cour de justice, qui est intervenue en 2021 ».

« Il y avait beaucoup de pression pour q u’il soit approuvé. Il y avait des députés qui ont voté sur une chose en commission et ont changé d’avis en session plénière. Ce sont toujours les socialistes espagnols qui changent d’avis au dernier moment », raconte-t-elle au journal.

L’eurodéputée rappelle également un incident survenu lors d’une session de la commission de pêche en 2018. A cette occasion, elle a reçu « de lourdes insultes du représentant du Maroc, avec des cris », en raison du Sahara occidental occupé.

« Le Marocgate ne m’a pas surprise », a lancé Ana Miranda. Les Sahraouis sont les plus touchés par ce scandale de corruption, eux qui luttent pour leur autodétermination et indépendance.

L’eurodéputé espagnol Miguel Urban (Groupe de la Gauche) a, de son côté, expliqué au journal italien que « pendant de nombreuses années, nous n’avons pas compris pourquoi le Sahara occidental était un sujet sur lequel les institutions européennes ne faisaient rien ».

Pour lui, « le Maroc est l’enfant gâté de la politique étrangère de l’UE (…) Le Maroc avait besoin de corruption parce que le régime voulait tout garder sous contrôle à 100% ».

Miguel Urban confirme « qu’en 25 ans de vote sur des résolutions urgentes, il n’y en a pas eu une seule sur les droits de l’Homme au Maroc et la situation au Sahara occidental ».

Il raconte comment dans le passé, les Socialistes européens, notamment Espagnols, ont tout fait pour plaire au Maroc comme lorsqu’en octobre 2021, ils ont voté pour la candidate proposée par Vox et Fratelli d’Italia pour le prix Sakharov des droits de l’Homme, pour empêcher la militante sahraouie Sultana Khaya de figurer parmi les finalistes.

De l’argent, des costumes et des cravates pour les corrompus

Par ailleurs, selon le site fanpage.it, l’assistant parlementaire Francesco Giorgi aurait expliqué aux juges que l’eurodéputé Andrea Cozzolino était impliqué dans cette affaire et a eu des contacts avec l’ambassadeur du Maroc à Varsovie, Abderrahim Atmoun, grâce à l’ancien eurodéputé Pier Antonio Panzeri, qui était le président de la commission Maghreb et qui avait ensuite passé le relais à Cozzolino.

Selon Giorgi, Panzeri n’aurait pas pris seulement quelques dizaines de milliers d’euros du Maroc mais aussi des costumes et des cravates, même après quand il n’était plus président de la commission.

Il explique que l’objectif de la corruption était de favoriser le Maroc et d’approuver des résolutions contre certains pays, notamment l’Algérie, en échange de 50.000 euros.

En dernier, Ilfattoquotidiano note que pour la première fois depuis 25 ans, le Parlement européen vote cette semaine une résolution présentée par le Groupe de la Gauche sur la répression contre les journalistes au Maroc, notamment contre Omar Radi, 36 ans, condamné à six ans de prison en mars dernier. « Il y a un mois, la proposition, qui a reçu le vote favorable des socialistes, n’aurait pas abouti », conclut le journal.
R. I.