Présidentielle 2019 : un choix cornélien ?

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Contrairement à l’élection présidentielle avortée du 4 juillet passée, celle programmée pour le 12 décembre semble obstinément tenir la route, le pouvoir en place ayant mis en branle tous les rouages des mécanismes institutionnels. Dont l’opération de  la révision des listes électorales, achevée le 6 du mois en cours,  la remise des formulaires de candidature et surtout la mise en place d’une autorité nationale indépendante des élections (ANIE).

Une démarche qui a trouvé écho auprès de plus de 100 postulants jusqu’ à présent et où les deux anciens chefs de gouvernement, Ali Benflis et Abdelmadjid Tebboune font, véritablement figure, de chevaux de retour, alors que  Mesdoura et Arar se présentent comme de jeunes loups, issus de la société civile.

Mais  les choses ne semblent pas aussi faciles pour les promoteurs de l’élection à tout prix et de lourdes appréhensions planent sur la tenue de cette échéance électorale tout autant capitale, dans le fond,  que  pestiférée, dans la forme.

En cause, le choc, toujours vivace, entre les forces centrifuges qui pèsent sur la scène nationale, traduit, principalement par le bras de fer entre le pouvoir, incarné de facto, par le chef de l’Etat major de l’Armée, Ahmed Gaïd Salah et le mouvement populaire  en action depuis le 22 février et qu’appuient, sans pour autant en avoir l’onction d’autres pôles où l’on retrouve une classe d’opposition fragmentée en personnalités influentes et une classe politique radicale (RCD-FFS- PT- MDS) ou soft à l’image d’un MSP campant sur un ‘’oui, mais…’’ des plus spéculatifs.

Du pourtour nihiliste de l’aile radicale prônant le ‘’dégagisme’’ totale des affidés de l’ancien régime, dont Gaïd Salah lui-même, à l’accommodation tiède et conditionnelle avec la perspective avancée par le pouvoir, les griefs  surfent au gré des étapes fixées pour arriver à une Présidentielle qu’un camp jure par tous ses grands dieux qu’elle sera honnête et transparente pendant que l’autre voit dans chaque recoin les sempiternelles manœuvres faisant le lit à la fraude pour perpétuer le système honni.

Objectivement, sied-il de tordre le cou, à coup d’a priori,  à toute solution de sortie de crise émanant du pouvoir  au prétexte que ce dernier en est la cause, quand le pays va à la dérive économiquement, politiquement avec le spectre de la division et de la fitna et socialement ? Faudrait-il détenir la science infuse pour répondre, tout aussi objectivement, à cette question !

Mais un regard porté à froid sur le cours des événements pourrait apporter des éléments de réponse.

Le formidable élan populaire du 22 février a eu pour mérite de balayer l’ancien régime. L’institution militaire, incarnée par Gaïd Salah, quand bien même homme  affidé pendant des lustres à ce même régime, a eu cet autre mérite de conduire une inédite opération anti corruption, dans les annales des nations, et où des dizaines de hauts cades de l’Etat ont été mis aux fers.

Enfin l’establishment a parachevé l’action en, d’une, initié un dialogue national via un Panel  ad hoc et, de deux, en instituant, pour la première fois dans l’histoire du pays, une autorité indépendante pour les élections tout en neutralisant dans les faits l’Administration en amont et en aval.

C’est sans conteste, le plus gros acquis s’agissant du régime électoral, en dépit des réserves qui peuvent être faites sur la composante humaine  et dont une mobilisation de la trempe du hirak peut vite neutraliser, à son tour.

C’est là où l’opposition, dans sa globalité, s’est fourvoyée en pratiquant la politique de la chaise vide, suivie dans sa logique par des personnalités charismatiques influentes qui auraient pu court- circuiter la moindre arrière pensée du pouvoir.

Avec beaucoup moins de gages de transparence et d’honnêteté et un candidat adoubé au grand jour,  la Présidentielle 1999, avait vu des ténors de la politique, dont feu Hocine Aït Ahmed, Ahmed Taleb Ibrahimi, Mouloud Hamrouche etc  y prendre part avant de délégitimer, par un retrait massif devant la fraude, le président élu, Abdelaziz Bouteflika.

Ce qui n’avait pas non plus, dissuadé, certains partis politiques se revendiquant de l’opposition à l’époque, de concourir par la suite aux élections législatives et prendre des portefeuilles ministériels.

Bien sûr, le propos peut paraitre tenir des thèses du pouvoir, au moins pour les tenants du nihilisme, et pourtant, et au regard de la non faisabilité d’une transition chronophage à l’issue incertaine, l’opinion  aurait, sans nul doute, bien vu  l’émergence de personnalités probes et intègres prendre à son jeu, si jeu il y a, le pouvoir ; avec comme ultime et grand rempart, le peuple dans sa grande majorité.

De ce point de vue, Mouloud Hamouche, pour l’exemple seulement, et  qui jouit d’une aura avérée dans les quatre points du pays, en témoigne la récente procession citoyenne jusqu’à son domicile le suppliant de candidater à l’élection,  aurait gagné à revêtir l’habit du sauveur que voit en lui un peule désemparé et fortement inquiet plutôt que la toge d’un oracle s’exprimant ex cathedra !

Azzouz K.