Ali Hamani, président de l’APAB : «Les producteurs informels nous font beaucoup de tort»

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La production de boissons diverses représente l’une des plus importantes industries du pays. Son chiffre d’affaires atteint les 260 milliards de dinars par an pour une production estimée à 4,5 milliards de litres/an. Ses capacités à l’export avoisinent les 38 millions de dollars. Dans cet entretien, Ali Hamani, président de l’APAB, nous présente un secteur en pleine expansion. Cela, non sans évoquer les nombreux problèmes auxquels fait face la filière boisson. Le défi qui se pose est de taille : pour rester dans la concurrence, ou du moins maintenir cette cadence, le secteur doit se libérer de quelques contraintes.

Le premier Salon International des Boissons des Arômes et des Produits Laitiers (SIBAL Expo 2017) s’est tenu les 27-28 et 29 novembre, à Alger. Que retenez-vous de cette manifestation, la première du genre ?

Nous avons affiché notre adhésion à la tenue du Salon international des boissons, des arômes et des produits laitiers (SIBAL-expo). Ce choix répond au besoin de faire connaitre davantage la filière de la boisson et de sensibiliser aussi bien les pouvoirs publics que les consommateurs. Un pareil salon est également censé rapprocher les producteurs de boissons des fournisseurs des diverses matières premières qui leur sont nécessaires, aux fins de tenter de créer des synergies entre ces deux acteurs économiques.

 Que représente ce secteur en matière de chiffre d’affaires et de capacités de productions ?  

L’industrie de boisson se développe d’année en année. Il s’agit, en fait, de la seule industrie qui satisfait plus de 98 % de la consommation nationale. Les capacités existantes couvrent largement l’ensemble des besoins locaux, et peuvent même répondre à une demande internationale importante.  Actuellement, elle représente un marché de près de 4,5 milliards de litres/an hors lait conditionné. Le secteur avoisine un chiffre d’affaires de 260 milliards de dinars et génère plus de 20 000 emplois directs et 60 000 emplois indirects.

Le marché des boissons non alcoolisés affronte une problématique qui réside dans l’application de la réduction du taux de sucre dans les boissons. Où en êtes-vous à propos de cette question ?

Le problème qui se pose est que l’opérateur vend en fonction de l’exigence du consommateur. Le taux de sucre appliqué en Algérie est au même niveau que pour le reste de l’Afrique et le Monde arabe. Ceci est dû en fait aux habitudes alimentaires du consommateur. C’est un souci majeur qui a été posé par l’ensemble des opérateurs concernés, que ce soit par le ministère de la Santé ou l’association de protection du consommateur, afin de réduire les maladies non-transmissibles. Nous avons adhéré à cette démarche, en tant que producteur de boisson et nous avons appelé à ce que l’ensemble des acteurs économiques de l’agroalimentaire adhèrent à une démarche commune visant à réduire le taux de sucre dans leurs produits respectifs. Il n’est pas seulement question de sucre. Le sel et les acides gras sont eux aussi concernés. D’ailleurs, depuis quelques années, nous voyons émerger des appels d’associations de consommateurs pour la réduction du taux de sucre dans les boissons. Nous avons engagé une étude par le biais d’un cabinet d’expert international grâce auquel nous avons déduit que la moyenne du taux maximum que devrait contenir les boissons ne dépasse pas les 135 grammes par litre. Dans ce cadre, nous avons pris part à de nombreuses séances de travail initiées par le Ministère du commerce et celui de la Santé, et ce dès l’été 2016, notamment dans le cadre des travaux du Comité Technique portant sur la Promotion d’Alimentation Saine, présidée par le Professeur BROURI. L’APAB qualifie ce surdosage en sucre de responsabilité collective. Les pouvoirs publics doivent jouer leur rôle quant à l’application des directives. Tous les départements ministériels sont interpelés pour adopter une démarche de sensibilisation dans ce sens. Ceci doit être suivi par des mesures de contrôles ajustées sur le terrain. Quant au consommateur, il devra bien adopter ses goûts et ses choix, car il y va de sa santé.

Quelles sont les difficultés ou problématiques auxquelles fait face le secteur de la boisson en Algérie ?

L’activité pâtit d’une arrivée massive d’opérateurs non professionnels activant dans l’informel. Un certain nombre de producteurs malveillants et ne respectant pas les normes de production portent atteinte aux professionnels du secteur. Nous observons également l’existence d’une pression fiscale très importante, notamment au niveau de la sous-filière eau embouteillée. La sous-filière jus et boissons fruitées pose des problèmes concernant la confusion qui existe dans la classification du produit. A ce titre, nous avons soumis, en 2015, nos propositions pour la promulgation du premier règlement technique algérien sur les jus de fruits et boissons fruitées, nous attendons sa promulgation. La filière, qui prend une part de plus en plus importante dans les industries agroalimentaires, a exporté ces dernières années pour près de 38 millions de dollars. Aujourd’hui, nous essayons de régler quelques contraintes avec le ministère de Commerce, de l’Industrie, cela dans le cadre de relations avec l’Union européenne ou dans le cadre de facilitations en matière de crédits. Il faudrait qu’il ait une stratégie vers l’export et que le gouvernement affiche une politique claire et définir quels sont les produits exportables.

Propos recueillis par Lynda Mellak