Migrants tués par la police marocaine : HRW appelle à l’ouverture d’une enquête « indépendante »

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L’ONG Human Rights Watch (HRW) a appelé, mercredi, à l’ouverture d’une enquête « indépendante » et « impartiale » sur la mort d’au moins 23 migrants d’origine africaine, brutalement tués vendredi par la police marocaine alors qu’ils tentaient d’entrer dans l’enclave espagnole de Melilla depuis le Maroc.

« La mort d’au moins 23 hommes africains à la frontière Melilla-Maroc le 24 juin 2022 nécessite une enquête indépendante et impartiale capable de déterminer ce qui s’est passé et qui porte la responsabilité de ces pertes en vie humaine », a indiqué HRW dans un communiqué.

La directrice adjointe par intérim pour l’Europe et l’Asie centrale aux droits de l’Homme, Judith Sunderland a assuré que « des vidéos et des photographies montrent des corps éparpillés sur le sol dans des mares de sang, les forces de sécurité marocaines donnant des coups de pied et battant des gens, et la Garde civile espagnole lançant du gaz lacrymogène sur des hommes accrochés à des clôtures ».

« Les responsables en Espagne, au Maroc et dans l’Union européenne devraient condamner cette violence et garantir des enquêtes efficaces et impartiales pour rendre justice à ceux qui ont perdu la vie », a-t-elle ajouté.

Human Rights Watch fait écho aux appels lancés par des organisations marocaines et espagnoles, la Commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme Michelle Bachelet et l’Union africaine pour une enquête.

Les informations selon lesquelles les autorités marocaines pourraient organiser des enterrements collectifs à la hâte sont profondément préoccupantes, a précisé l’ONG.

Le 26 juin, l’Association marocaine des droits humains (AMDH) a publié sur Twitter deux photographies de ce qu’elle estime être entre 16 et 21 tombes creusées dans un cimetière à la périphérie de Nador, la ville marocaine se trouvant de l’autre côté de la frontière de Melilla.

En examinant ces photographies, Human Rights Watch a pu identifier au moins 10 tombes individuelles fraîchement creusées. Le quotidien espagnol El Pais a obtenu une photographie des mêmes tombes qu’il a publiée le 26 juin. L’ONG a vérifié de manière indépendante l’emplacement exact des tombes dans ledit cimetière.

Les images satellite recueillies le 27 juin montrent une « perturbation récente du sol » à l’emplacement des tombes fraîchement creusées identifiées sur les photographies vérifiées par HRW.
« Ces observations n’étaient pas visibles sur les images satellite enregistrées le 23 juin », la veille du drame, précise l’ONG, relevant que « la préservation des preuves est cruciale pour assurer une enquête complète ».

A cet égard, HRW a indiqué qu' »il est d’une importance vitale que les autorités marocaines mettent tout en œuvre pour préserver les corps de manière digne et appropriée afin de permettre les autopsies et la vérification de la cause du décès ».

Vendredi au poste-frontière de Melilla, au moins 23 migrants d’origine africaine ont été brutalement tués par la police marocaine, qui tentait de les empêcher d’entrer dans l’enclave espagnole.

De nombreuses vidéos et images ont circulé sur les réseaux sociaux montrant des dizaines de migrants au sol, quasiment inertes. Certaines montraient également les forces de sécurité marocaines en train de tabasser des migrants.

Des séquences vidéo prises par l’AMDH montrent un agent de sécurité marocain frappant au sol des hommes visiblement blessés et un autre agent jetant un corps inerte sur plusieurs personnes.

Human Rights Watch a souligné que « des enquêtes crédibles sur ce qui s’est passé devraient impliquer des experts et des observateurs internationaux pour renforcer, tant dans la pratique que dans la perception, l’impartialité, l’indépendance et l’efficacité » de ces enquêtes.

A noter qu’un sit-in contre « les décès aux frontières » sera organisé vendredi à 18h30 devant le Parlement marocain à Rabat sous le slogan « Les vies des migrants comptent », en signe de solidarité avec les migrants tués.
R. I.